Etude de réhabilitation du boulevard Rabatau à Marseille (TWSINFO N°07 – Mars 1998)

par le laboratoire des Ponts et Chaussées d’Aix-en-Provence.

Le Laboratoire des Ponts et Chaussées d’Aix-en-Provence a conduit l’étude de réhabilitation du boulevard Rabatau à Marseille selon sa méthodologie « chaussées urbaines », laquelle combine un système de notation et le système-expert ERASMUS.

Plan Boulevard Rabatau.

Introduction

Le boulevard Rabatau à Marseille est une chaussée à 2 X 2 voies contiguës située entre le Rond-Point du Prado et l’Autoroute A50 Marseille-Aubagne. Cette chaussée urbaine longue de 1 500 mètres a une structure hétérogène (hydraulique ou souple) et connaît un trafic élevé et lourd.

En 1997, cette chaussée présentant d’importantes dégradations (déformations, fissurations, faïençages) et les derniers travaux réalisées sur la chaussée remontant à 1989, la Direction des Routes, des Transports et de l’Equipement du Département des Bouches-du-Rhône, arrondissement de Marseille, représentée par M.Desroches du service de M.Pruvost, décidait de réhabiliter cette chaussée et de confier l’étude correspondante au Laboratoire Régional des Ponts et Chaussées d’Aix-en-Provence.
L’objet de cet article est d’illustrer, au travers de l’exemple du boulevard Rabatau, l’approche suivie par le service Mécanique des chaussées du Laboratoire pour analyser les chaussées urbaines.

Caractériser l’itinéraire

La première étape de l’étude a consisté à caractériser le boulevard en terme de trafic poids-lourd, de niveau de portance, de dégradations et de structure.

Trafic poids-lourd

Le boulevard Rabatau comprend deux zones distinctes, la zone 1 de l’Autoroute A50 à la place du Général-Férié et la zone 2 de la place du Général-Férié au Rond-Point du Prado.

Ces zones connaissent des trafics qualitativement différents, respectivement un trafic de type Desserte pour la livraison des magasins et boutiques et un trafic de type Transit traversant l’agglomération.
« En zone urbaine, il est très important de qualifier la nature du trafic poids-lourd », précise Michel DAUZATS, adjoint au Directeur du Laboratoire, chargé du Domaine des Routes.
La DRTE a communiqué, pour chacune des deux zones, les volumes de trafic tels que mesurés en 1996, soit 34 000 V/J et 17 000 V/J, et les pourcentages estimés de trafic poids lourd, soit 6 % et 3 %

Fort de ces informations, le Laboratoire a estimé le trafic poids lourd sur chaque voie dans chaque sens pour les deux zones sur la base des hypothèses suivantes :

- répartition du trafic poids lourd entre voie lente et voie rapide avec une clé 60 % – 40 %,

- minoration de 30 % sur le trafic poids lourd de la zone 2 compte tenu de sa nature (Desserte) « pour ne tenir compte que des poids lourds de plus de 35 KN de poids total en charge ».

Enfin, le pourcentage de trafic lourd pris égal à 6 % sur la zone 1 est apparu surévalué au Laboratoire qui a proposé à la DRTE de le ramener à 4 %.

Déflexion

La déflexion apparaît aux techniciens du Laboratoire comme un paramètre essentiel.
« Nous, les techniciens routiers, nous la comparons à la température du patient pour le médecin », explique Paul BASTONERO du service Mécanique des chaussées.
Pour ce qui concerne le boulevard Rabatau, les mesures de déflexion ont été réalisées en juillet 1996 et juillet 1997 sur les deux voies lentes de chaque sens de circulation.
« On a trop tendance à penser qu’en ville la déflexion est la même dans les deux sens de circulation. Cela est vrai en général mais peut se révèler faux sur un cas particulier ! Pour fournir des résultats fiables, il faut disposer de la déflexion dans les deux sens », souligne Michel DAUZATS.
La valeur de déflexion permet de qualifier la chaussée, en terme d’une note « Niveau de déformabilité », calculée en fonction des valeurs limites admissibles de déflexion définies par le Laboratoire d’après le trafic et le type de chaussée.
Le niveau de déformabilité du boulevard a été noté comme médiocre ou douteux sur 38 % (resp. 26 %) de la zone 2 (resp. zone 1).

Dégradations de surface

Le relevé de dégradations a été effectué suivant la méthode LPC n° 38 à partir d’un relevé M2 applicable aux études d’évaluation, lequel permet le calcul de la note « Qualité apparente de la chaussée » suivant un arbre de décision défini par le Laboratoire.

Structure de chaussée

Le boulevard présente une structure très hétérogène, liée pour partie à la réalisation de nombreuses purges dans les voies lentes en 1988 et 1989. Aussi, l’investigation de la structure a été conduite suivant deux approches complémentaires : l’analyse des informations à caractère continu, déflexion et état de surface, et la réalisation de sondages ponctuels.
Les informations à caractère continu, qui ont été synthétisées dans les notes « Niveau de déformabilité », « Qualité apparente de la chaussée » et « Classe de structure », ont mis en évidence une classe de structure médiocre sur 69 % de la zone 1 et 72 % de la zone 2.
Les 5 et 16 sondages ponctuels, respectivement réalisés sur les zones 1 et 2, essentiellement dans les voies lentes plus détériorées, ont permis de connaître et vérifier les corps de chaussée et de détecter la présence de pavés entiers ou scellés par morceaux.

 

Proposer des travaux

Méthode suivie

Le problème de la définition des travaux a été ramené au traitement ERASMUS de quatre cas, un cas de chaussée souple et un cas de chaussée hydraulique pour chacune des deux zones.
Les solutions à base d’EME (enrobé à module élevé) ont été privilégiées. « Nous avons privilégié ce matériau parce qu’il est très rigide, avec un bon comportement à la fatigue, ce qui, dans ce contexte, permet de minimiser les épaisseurs », précise Michel DAUZATS.
Les solutions proposées ont été calculées pour une durée de vie structurelle de 15 ans, une évolution annuelle du trafic poids lourd de 2 % et un niveau altimétrique après rénovation identique à celui de la chaussée actuelle.

Il a été nécessaire d’étendre le paramètrage initial d’ERASMUS en introduisant le matériau « pavé urbain », décrit comme une grave ciment fracturée de 1 500 Mpa (15 000 bars).

Solutions de travaux

La solution proposée par le Laboratoire consistait, après décaissement préalable, à la mise en œuvre d’un EME0/14 de type 2 (NFP 98.140) appliqué en une ou deux couches selon un dimensionnement variable suivant la voie (lente ou rapide) et la zone (1 ou 2) et une couche de roulement constituée par un BBTM 0/6 ou 0/10 (NFP 98.137).
Dans cette solution, les pavés étaient conservés partout sauf sur la voie lente de la zone 1.

Pour des raisons budgétaires et industrielles, le maître d’œuvre a décidé d’appliquer une solution unifiée sur les deux zones en décaissant jusqu’aux pavés. Les travaux correspondants ont été réalisés au cours de l’été 1997.